L'économie, c'est pas si compliqué, mais les économistes préfèrent que vous le pensiez. Afin de terminer l'été sur une note positive, de s'instruire en s'amusant et de relancer l'intérêt que les gens* portent à ce blog resté trop longtemps en friche pendant que votre serviteur se dorait les côtes dans un transat de luxe, face à la Méditerranée, entouré de jeunes naïades exotiques réclamant sans cesse de nouvelles anecdotes sur la musicalité du montage dans le cinéma de McTiernan ou les études de Tim Leary sur l'imprinting et le modèle des huit circuits, voici expliqué avec simplicité et efficacité un des derniers théorèmes économiques en vogue : le C.H.M., ou Carambar Hypothétique de Maille.
Un détour par la presse de gauche
Bernard Maris, meilleur économiste de France et rédacteur en chef du satirique Charlie Hebdo, démystifie majestueusement l'économie dans son ouvrage L'Antimanuel d'Economie : "l'économie, c'est le partage du gâteau". L'économie, c'est l'art et la science de répartir les ressources. L'ouvrage est intéressant, montre les limites des modèles habituels de l'économie libérale mais surtout, surtout, il introduit une notion importantissime : la métaphore pâtissière.
Les flux monétaires, ça fait peur, les actions ça effraye mais un gâteau, quoi de plus inoffensif ? Ce courant de pensée, qui devait bientôt porter le nom de gourmandising, n'a rien moins que révolutionné la façon d'établir des outils et des modèles économiques.
Une à l'endroit, une à l'envers
Le 16 août 2010 - c'était un lundi, un des précurseurs du gourmandising, Frédéric Maille de l'université de Liège (Belgique), déclare entre deux cafés sur un réseau social :
"(...)si la taille du Carambar avait suivi l'inflation de son prix depuis 10 ans, il mesurerait maintenant 80,05 cm"
Cette réflexion essentielle donna naissance à un des outils d'analyse économique les plus importants depuis les micromodèles keynsiens : le fameux Carambar Hypothétique de Maille, qui devait rapporter à l'auteur le Prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel en 2012, juste avant les événements tragiques qu'il est inutile de rappeler à notre lectorat cultivé.
Aller toujours plus loin
Ce qui fait le génie de la chose, c'est moins le rapport taille / prix que le sujet : le carambar est un objet éminemment analysable. Parlons chiffres.
Le carambar étant avant tout nutritif, son contenu calorique est un facteur déterminant : le carambar moyen contient 33.012 calories. Le C.H.M. contient donc 352 kilocalories.
Un carambar moyen fait également 7,5 cm de long et son emballage contient 2,8 blagues, ce qui nous donne une densité humoristique (ou dH) de 0,374 blague par cm. On peut donc déduire que le C.H.M. contient 29,88 blagues.
En poussant l'analyse, rappelons qu'une blague carambar standard fait 275 caractères, ce qui donne au C.H.M. un contenu informatif de 8.217 signes (espacement et ponctuation comprises).
Terminons enfin par l'argent : si un carambar de 80cm de long était effectivement mis en vente, il coûterait effectivement 1,60 €. Le ratio carambar (ou rC) est donc de 0,15€ = 275 signes = 33 kcal, ou 1€ = 1.833 signes = 2.200 calories.
Denrées, finances, information
Le C.H.M., loin d'être un simple modèle abstrait, nous fournit un lien direct entre trois facteurs socioéconomiques primordiaux : la nourriture, l'argent et l'information. Sur ce modèle, nous pouvons enfin comparer l'incomparable : si un article de quatre feuillets du Télépro fait en moyenne 8.000 signes, nous pouvons en conclure qu'il représente également un apport calorique de 9.200 calories s'il est ingéré, ce qui est assez light.
Mieux : un iPod Touch 3G d'une capacité de 8 Go coûte 179,95€. Cela signifie qu'ingéré, il procure à l'utilisateur 395,89 kcal, une sacrée entorse à votre régime, madame ! De plus, selon l'index du C.H.M., il contient 329.848,35 signes, ce qui converti en mémoire informatique représente 320,86 Mo, soit à peine la moitié d'un CD. Seulement 1.200 blagues carambar !
Ce lien indestructible entre la subsistance physique, économique et informationnelle est un index indispensable pour représenter numériquement le monde dans lequel nous vivons. Le C.H.M. s'impose, tant dans la clarté de l'intuition initiale que dans les multiples applications pratiques, comme un jalon incontournable de l'économie moderne et un des chemins pour son intégration dans la vie quotidienne. J'en veux pour preuves les deux démonstrations ci-dessus, qui mettent respectivement en lumière le caractère inoffensif d'un magazine télé pour la ligne et le manque total de scrupules du département merchandising d'Apple, Inc.
Merci, monsieur Maille
Chassons à jamais l'incertitude de notre vision économique du monde : grâce au C.H.M., le monde s'ouvre à nous avec une clarté éblouissante, traçant fièrement la route vers un avenir meilleur. Je me joins donc au choeur unanime des professionnels de la profession et je lève mon verre : merci, monsieur Maille.
* Bonjour maman.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire